Dans un secteur minier de plus en plus exposé aux exigences de transparence et de responsabilité, les normes de déclaration des ressources et réserves constituent un socle fondamental pour sécuriser les investissements et structurer le développement. Cet article retrace l’origine de ces standards, analyse leurs différences, et présente les efforts d’harmonisation internationale à travers l’UNFC et l’UNRMS. Il met en lumière l’intérêt stratégique pour les juridictions émergentes d’adopter des référentiels reconnus, tout en appelant à une appropriation nationale pour renforcer la crédibilité et la création de valeur durable.
Introduction
Dans un contexte où l’industrie minière joue un rôle central dans l’économie de plusieurs pays, notamment dans les juridictions émergentes, la communication transparente et fiable avec la communauté financière constitue un levier essentiel pour accéder au financement et soutenir l’exploration et le développement des projets miniers. Les normes de déclaration des ressources et réserves minières sont à la base de cette communication, car elles permettent aux investisseurs d’évaluer le potentiel des actifs miniers sur des bases techniques fiables et comparables. Ces normes garantissent une classification homogène des gisements, une validation par des experts qualifiés et une gestion rigoureuse de la chaîne de valeur.
1. De la nécessité des normes et standards de déclaration des ressources/réserves
Historiquement, plusieurs incidents majeurs ont démontré la nécessité d’encadrer strictement la déclaration des ressources et réserves :
- Bre-X (Canada, 1997) : une fraude massive sur les réserves d’or présumées, entraînant une perte de plusieurs milliards de dollars pour les investisseurs et une chute de la confiance dans les rapports techniques.
- L’affaire Poseidon (Australie, années 1970) : spéculation démesurée sur un dépôt minier sans base technique solide.
Ces cas ont conduit à la création ou la réforme de normes nationales et internationales, visant à encadrer l’usage des termes « ressource », « réserve » et à responsabiliser les professionnels dans la déclaration.
2. De la différence des normes et des standards de déclaration
Les principales normes de déclaration émanent d’organisations membres du CRIRSCO (Committee for Mineral Reserves International Reporting Standards), dont les plus reconnues sont :
Norme | Pays / Organisation | Personne qualifiée (PQ) | Classification | Autres particularités |
JORC | Australie (JORC) | Oui, membre reconnu | Measured / Indicated / Inferred / Reserve | Insistance sur la compétence et l’expérience |
NI 43-101 | Canada (CIM/CSA) | Oui, inscrit et expérimenté | Idem | Forte responsabilité juridique |
SAMREC | Afrique du Sud | Oui, SAMCODES membre | Idem | Intégration ESG croissante |
PERC | Europe | Oui | Idem | Adaptation aux pays membres |
Ces standards présentent des convergences, notamment sur la classification des ressources, mais divergent par l’encadrement de la personne qualifiée, la structure du rapport technique, ou la prise en compte des aspects ESG.
3. De l’évolution vers une harmonisation globale : UNFC et UNRMS
L’United Nations Framework Classification for Resources (UNFC) a été conçu pour offrir une grille multidimensionnelle applicable à toutes les ressources naturelles (minérales, énergétiques, eau, etc.). Cette approche se base sur trois axes :
- E : faisabilité économique
- F : faisabilité technique
- G : niveau de confiance géologique
Elle a évolué vers l’UNRMS (United Nations Resource Management System), visant une intégration plus large des objectifs de développement durable et une gouvernance plus holistique des ressources.
Dans ce cadre, les standards nationaux et régionaux sont appelés à converger. Le CRIRSCO, par le biais de ses membres (JORC, NI 43-101, PERC, etc.), participe à cette convergence via des groupes de travail techniques avec la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe (UNECE).
Norme | Orientation | Intégration ESG | Portée | Applicabilité intersectorielle |
CRIRSCO | Géologique / Minière | En cours | Minières uniquement | Non |
UNFC | Multi-ressources | Moyenne | Minérales / énergie / eau | Oui |
UNRMS | Gestion intégrée | Forte | Ressources naturelles | Oui |
Conclusion
L’utilisation de normes solides dans la déclaration des ressources et réserves est un facteur essentiel pour renforcer la transparence, protéger les investisseurs et accéder à un cycle vertueux de création de valeur. Dans les juridictions émergentes, où les besoins en financement et les attentes sociétales sont plus intenses, l’adoption de standards reconnus permet d’attirer des capitaux responsables et de mieux ancrer les projets dans le long terme.
Les gouvernements sont appelés à promouvoir ces pratiques, en les intégrant dans les cadres législatifs ou fiscaux, et en formant les jeunes professionnels à ces standards. Au-delà de l’application, il est souhaitable que des compétences nationales émergent pour participer à l’évolution de ces normes, voire développer des standards spécifiques qui répondent aux réalités et ambitions locales.
Par Yassine Belkabir, fondateur et gérant de African Bureau of Mining Consultants
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